La machine égalitaire

La « machine égalitaire »? Tout un ensemble de procédures, mécanismes ou institutions qui travaillent, depuis cinquante ans, à réduire les inégalités. Premier constat de ce livre : avant connu son apogée aux riches heures de l'État providence, la machine est, presque partout, en train de se gripper. Le deuxième : non contente de buter sur les inégalités traditionnelles, elle en induit de nouvelles qui aggravent encore les choses et qu'elle ne gère pas davantage. Le troisième : c'est tout le paysage, toute la carte sociale des démocraties qui commencent de se recomposer avec leurs brahmanes, leurs intouchables, leurs classes moyennes repues et leurs règles d'exclusion inédites. Et le quatrième enfin : il faut penser tout cela - et, donc, pour y remédier - tourner le dos au passé en révisant de fond en comble nos outils intellectuels consacrés.
L'objectif, en d'autres termes, reste le même. Le rêve égalitaire conserve, aux yeux de Minc, sa valeur et ses prestiges. Les moyens, simplement, doivent changer. Les grilles de lecture doivent se renouveler. Avec, notamment, cette conviction qui court tout au long du livre : ce n'est pas en bridant, mais en aidant, poussant, jouant le jeu du marché que l'on rendra à ce rêve toutes ses chances de s'incarner. Paradoxe ? Oui, paradoxe. Scandale, peut-être. Crime de lèse-idéologie. Encore que la démonstration soit, sur le fond, imparable : c'est la mobilité, la fluidité, la concurrence même ou la sélection qui, en cette fin de siècle, riment avec égalité.

Source : Le Livre de Poche, LGF