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Tais-toi, je t'en prie

Tais-toi, je t'en prie

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  • Résumé

    Un personnage de Tchekhov, qui n'a connu dans la vie que déboires et malheurs, se voit prédire une catastrophe; il accueille l'augure avec scepticisme : « Quel mal peut-on faire encore à un poisson péché, cuit et servi en sauce? » On ne saurait trouver meilleure définition des personnages de Raymond Carver. Ce sont des poissons péchés, cuits, servis en sauce et pourtant, il continue de leur arriver des malheurs... Rien qui ait l'allure d'une somptueuse apocalypse, mais seulement de petites misères taraudantes qui font de ces Hamlet de cafétéria et de ces Ophélie de motel les toupies d'une fatalité au rabais.
    Les personnages de Carver ressemblent à des feuilles mortes en quête d'un destin. Ils passent leur vie à exposer à leurs pareils la manière dont ils vont s'y prendre pour être heureux. Ils cherchent à se débarrasser d'un meuble, d'un chien, d'une femme ou d'un parent, dans l'espoir qu'une fois seuls ils trouveront leur destin. Parfois, ces tragédiens mineurs ont le pressentiment d'un fatum, quand une conversation anodine, un incident, paraissent susceptibles de bouleverser le cours de leur destinée, mais ils s'aperçoivent qu'ils ne peuvent donner le nom de destin à cet enchaînement de faits étriqués.
    Pour avoir un destin, encore faut-il avoir une histoire. Chez Carver, il n'y a que des histoirés de couples, car « en épousant une femme, on se dote d'une histoire ». Si elle vous quitte, si elle vous trompe, si, d'une manière ou d'une autre, elle sort de votre vie, alors vous vous retrouvez en dehors de l'histoire, « relégué au rang d'anecdote ». Les couples de Carver sont la version pitoyable et déglinguée de celui formé par Ingrid Bergman et George Sanders dans le film de Rossellini, Le Voyage en Italie : un homme et une femme hantés par l'idée que divorcer, c'est sortir de l'histoire, de l'écran, du roman. « II faut qu'on s'aime. Il ne nous reste qu'à nous aimer », dit une jeune héroïne de Carver.
    Dans Tais-toi, je t'en prie, la plupart des textes mettent en scène un couple en proie à deux angoisses : le sexe et la bouffe. Bouffe bâclée des cafétérias, sexualité au rabais. Bouffe se raréfiant, sexualité déclinante. La même obsession poursuit ces personnages : compenser la bouffe par le sexe, compenser le sexe par la bouffe. Le recueil s'ouvre sur la longue cérémonie qu'accomplit à table un homme très gros, et sur le rêve, qu'il suscite chez une jeune femme, de l'obésité comme refuge. Dans la dernière nouvelle, qui donne son titre au recueil, l'angoisse atteint son apogée : un homme, quatre ans après les faits, apprend que sa femme a, un soir, « tenté le coup » avec un de ses amis de passage. Il s'enfuit de chez lui, erre dans la ville, entre dans un restaurant-dancing - en allant aux toilettes, il découvre sur le mur un dessin qui représente deux cuisses écartées et une vulve ouverte, sous le dessin, une main a griffonné : « Bouffe-moi. »
    Ailleurs, un vendeur de décapotables avoue qu'il préférerait passer pour un gangster ou un détraqué sexuel que d'être déclaré insolvable. Les histoires de Carver sont toujours des histoires d'hommes insolvables, de couples vivant une sexualité à crédit et comptabilisant les trahisons conjugales comme autant d'arriérés.
    Tais-toi, je t'en prie est un manuel de diagnostics autour d'un même thème : la virilité des insolvables.

    Source : Le Livre de Poche
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