Vive la révolution !

Il s’appelle Orion. Sa petite sœur s’appelle Liberté. Rien que ça, ce n’est pas facile à porter. Mais le pire, pour Orion, c’est que son père fasse la révolution. Et c’est fatigant, un papa qui fait la révolution. Car ce papa-là est contre tout : le nucléaire, les pesticides, le pétrole, la télé, les jeux vidéo, les poulets élevés en batterie, et même le feu dans la cheminée, qui contribue à la déforestation. Il passe son temps à manifester. Il a déjà été arrêté trois fois par la police.
En fait, le père d’Orion est chercheur, spécialiste de l’eau. Il voyage beaucoup. Il voyage tellement que son fils a un réel sentiment d’abandon. Comme Orion le dit à sa mère : « Il veut sauver le monde, mais sa famille, il s’en moque ! ». L’échouage d’un pétrolier sur les côtes de Bretagne sera la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Orion ne supporte pas que son père les quitte encore en catastrophe. C’est sa maman qui trouve la solution : Orion suit son père, pour soigner les oiseaux mazoutés. Au début, c’est l’affrontement : le fils se sent de trop, le père croit traîner un boulet. Mais peu à peu, le père prend conscience de ses excès et redécouvre qu’il a un fils, et Orion comprend enfin l’utilité des actions de son père.
Les relations père/fils sont un classique de la littérature jeunesse, mais le thème est ici singulièrement renouvelé. En fait, ce qui pose problème au petit garçon, c’est que son père se conduit, à ses yeux, comme un égoïste. Les pancartes, les manifs, les voyages : tout cela est fait sans tenir compte d’Orion et de sa petite sœur. Et puis ce papa qui est contre tout rend la vie tout simplement impossible. En fait, Orion a honte de son père, et ce sentiment est décrit avec beaucoup de sensibilité. Nul doute que bien des enfants se reconnaîtront, et reconnaîtront leur papa qui, quelque part, ne les prend pas vraiment en compte. Évidemment, la solution vient par le dialogue, par la connaissance de l’autre. Et ça marche dans les deux sens. Moralité : les parents ont aussi beaucoup à apprendre de leurs enfants.
Nous avons sélectionné ce texte avant le naufrage du Prestige. Mais cette histoire trouve, malheureusement, de profonds échos dans l’actualité.

Source : Milan