La vieille Lily

Lorsque la vieille dame et le chien atteignirent la route de Guadelupe, le sifflement de la tempête enfla pour devenir un rugissement sourd et continu, car le vent prenait tout le canon en enfilade.
Très vite, il assourdit complètement la vieille Lily. Elle ne vit rien, n'entendit rien, mais, soudain, se sentit heurtée et projetée en l'air. Les os brisés, les chairs déchirées, elle pensa à Muriel, puis sombra dans l'éternité et ce fut tout. Le chien hurla, puis geignit, sur la route enneigée. II n'émut personne. Derrière leurs rideaux épais, les riverains buvaient des cocktails en regardant la télévision. Une seule porte s'entrouvrit. Mais elle se referma bien vite, car le chien se taisait enfin.

Source : Le masque, Librairie des Champs Elysées