L'île d'un autre

La carte marine l'indique au large du Finistère sous le nom d'île de l'Albatros: elle est en forme d'amande et porte une seule maison grise à mi-pente, en partie cachée par une haie de lauriers cerises et deux dracaenas dépourvus de leur luxuriance africaine mais gardant l'attrait de t'exotisme.
Gilles Laborde la découvre un jour de mars où, parti de Roscoff sur son cotre la Délie, il se promène par petite houle sous un ciel gris. Cédant à une impulsion, il débarque, casse un carreau, pénètre dans la maison - et s'installe. Il entame les provisions, fouille les tiroirs, flaire les aîtres pour déceler la personnalité des habitants de cette demeure vide.
En somme, vol avec effraction aggravé de goujaterie : drôle de conduite, non ? de la part d'un spécialiste de littérature de la Renaissance, professeur à l'université de Rennes. Il le sait et, afin de se faire pardonner par le maître des lieux, ce LM, ce Laurent Mattius dont il a déchiffré un peu la vie, il écrira un livre-confession, lui qui a toujours rêvé d'un « Livre où éclaterait toute la vie d'un homme, toute son expérience, son espoir fou de toucher les autres au coeur ».
Et ce sera L'lle d'un autre, livre-somme où se déploient au maximum de leur puissance invention, culture et fantaisie, rassemblant les thèmes qui jalonnent une oeuvre riche et variée, vingtième roman et maître livre de Jacques Perry.

Source : Le Livre de Poche, LGF